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  • Homélie de la Veillée pascale 2024 en l’église St-Hilaire - P. Julien

    Veillée pascale 2024

    Chers amis, Chers frères et sœurs en Christ, Chers catéchumènes,

    Homélie de la Veillée pascale - P.Julien

    Librement, vous avez frappé à la porte de l’Église. Et librement, vous recevez le baptême dans un instant. Cette « liberté de choix » n’est pas l’apanage des chrétiens que nous sommes. Cette liberté est plus celle inscrite sur le fronton des édifices publics. Elle est aussi celle qui, revendiquée en forme de droit, peut devenir prétexte à un égoïsme exacerbé. Pourtant, en son temps, l’apôtre Paul a averti les Galates : « Vous avez été appelés à la liberté. Mais que cette liberté ne soit pas un prétexte pour votre égoïsme ; au contraire, mettez-vous, par amour, au service les uns des autres. » (Ga 5, 13). Ainsi comprise, la liberté ne consiste pas à faire ce que l’on veut, comme on le veut. Au contraire. Être libre, c’est ne pas se laisser tyranniser par nos propres désirs et pulsions. Être libre, c’est être capable d’accomplir le bien, et de rejeter le mal. Être libre, c’est entrer dans une démarche où l’autre a une telle dignité qu’il m’invite à prendre soin de lui.

    Baptisés, nous sommes appelés à la liberté. On peut même dire à notre libération. Celle qu’a connue le peuple hébreu, par son passage de l’esclavage en Égypte à sa Libération en Terre promise. Celle que nous connaissons aussi au jour de notre baptême : « Pensez que vous êtes morts au péché, mais vivants pour Dieu en Jésus Christ » (Rm 6, 11). Il ne s’agit plus de comprendre la liberté de choix, celle qu’on put connaître Adam et Eve, Abraham et Isaac, qui ont eu le choix d’écouter Dieu et de « prêter l’oreille » (Is 55, 3). Il s’agit d’être libéré de la servitude et de l’esclavage, ainsi que de toute frayeur.

    L’Évangile de cette nuit de Pâques nous permet justement de méditer sur ce qui paralyse ces femmes qui viennent au tombeau. Elles sont comme obnubilées par ce désir d’embaumer le corps, par une question matérielle et par leur mécompréhension de l’histoire du Salut. Elles sont donc emprisonnées dans leurs certitudes. Il m’arrive parfois d’entendre que quelques personnes ont des doutes : Jésus-Christ a-t-il vraiment fait ceci ou dit cela ? Est-il vraiment ressuscité ? Si Dieu existe, pourquoi le mal ? Ces doutes sont la preuve que tout est une question de foi ! Mais surtout, ne faites pas de vos doutes une certitude. « Cherchez le Seigneur tant qu’il se laisse trouver » (Is 55, 6).

    Dans notre temps où, en France, l’indifférence religieuse est largement partagée et les doutes sur toute forme institutionnelle sont légion, les chrétiens que nous sommes devons avoir cette saveur propre à l’Évangile. Il ne s’agit pas tant de nous donner des codes ou des normes pour nous reconnaître dans un entre-soi. Il s’agit bien plus de pouvoir témoigner de cette libération dont nous faisons tous l’expérience depuis notre baptême. Plongés avec le Christ, nous sommes déjà libérés du mal perfide… Mais pas encore totalement ! Oui, malgré notre baptême, le mal peut avoir prise sur nous encore. Mais nous savons qu’il n’aura jamais le dernier mot et que le Christ, victorieux de la mort, nous permet d’être libérés d’une servitude éternelle. Voilà sans doute un enjeu pour notre communauté en ces jours : affirmer en quoi le Seigneur nous a déjà libérés. Car voilà ce que notre monde attend : découvrir ces merveilles que le Seigneur fait pour nous ! Comment il nous sauve, nous relève, nous permet déjà d’être ressuscités avec lui. Catéchumènes et accompagnateurs, parrains et marraines, catéchistes et parents ou grands-parents… Ne restez pas arc-boutés sur des principes ou des règles à transmettre. Il n’y a rien d’autre à « faire » comme baptisés que d’oser, ensemble, témoigner de ce que le Seigneur fait pour nous.

    L’Évangile selon saint Marc, en cette nuit de Pâques, reste discret sur l’action des femmes venues embaumer le corps du Christ : rien n’est dit sur l’expérience de libération qu’elles ont connue. Christ est vivant, et elles n’ont qu’une nouvelle indication pour le trouver : « Il vous précède en Galilée » (Mc 16, 7). Cette indication fait tout de même notre délice. La Galilée de l’époque est une terre où l’indifférence règne aussi. C’est pourtant là que Dieu est. Sans doute qu’une première libération dont nous pouvons tous faire l’expérience en ces fêtes de Pâques, c’est de reconnaître que le Seigneur n’est pas là où nous souhaitons l’enfermer. Le rideau du temple s’est déchiré en deux (Mt 27, 51), précisément car Dieu n’est pas enfermé dans un espace donné. Depuis sa mort, son souffle est devenu notre souffle. Il est vivant en nous ! Ensemble, faisons l’expérience d’une véritable libération intérieure : Dieu n’est pas celui que nous voulons contenir en un lieu et dans un temps. Il nous précède, c’est-à-dire, il nous conduit là où nous n’imaginerions pas aller.

    Notre Église se réjouit de vous accueillir comme néophytes. Hier encore, personne ne pensait avoir autant de catéchumènes ! Et que dire pour vous, les familles, qui voyez votre petit-fils ou votre enfant oser plonger avec le Christ ? Dieu conduit son Peuple, bien au-delà de nos préjugés ! Dieu libère son Peuple pour lui permettre de faire l’expérience d’un passage, c’est-à-dire de sa propre Pâques. Alors ne restons pas là à nous endormir. Allons ! Cherchons les traces du vivant tout autour de nous. Celui-là même qui libère et celui-là même qui nous conduit. Amen.

    P. Julien DUPONT

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