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  • HOMÉLIE MARIAGE FRANCK ET MATHILDE

    1ère lecture : Gn 18, 1-15 (Abraham et les trois hommes au chêne de Mambré. C’était la première lecture de la messe du jour).
    Évangile : Jn 15, 9-13 (« … Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite. Mon commandement, le voici : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. »)

    Nous venons d’écouter un morceau central du Testament du Christ, ce qu’il disait à ses disciples « au moment de passer de ce monde à son Père », ce qu’il nous a laissé en héritage, à savoir : un commandement, une parole à garder : « aimez-vous les uns les autre » ; une promesse de vie et de fécondité : « pour que vous soyez comblés de joie ! » ; un don, une dote d’amour, le don de sa propre vie : « comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés, moi qui donne ma propre vie pour ceux que j’aime. Demeurez dans mon Amour ! » Et aujourd’hui, dans cette célébration, le Christ lègue cet héritage en particulier aux époux.

    Un commandement.

    Dans les dialogues qui vont suivre, et notamment par l’échange des consentements, Franck et Mathilde, en liant chacun, de manière fondamentale, définitive, irréversible, sa propre vie à celle de l’autre, vont chacun prendre sur leurs épaules ce commandement de l’amour de l’autre. Chacun d’entre deux va dire “oui” au commandement de donner sa vie pour l’autre, d’offrir toute sa vie comme “demeure” pour l’autre ; une demeure où recevoir tout l’autre, tout ce qu’il est, tel qu’il est ; une demeure où l’autre puisse se sentir en sûreté, en paix, trouver le repos, refaire ses forces. Et ils vont d’ores et déjà s’offrir l’un à l’autre tous les jours de leur vie commune. Chacun va ainsi dire “oui” à un appel qui donnera un sens profond à chacune de leur journée, en toute circonstance, rose ou moins rose : l’appel à mettre cette journée au service du bien du conjoint, la vivre en fonction pas seulement de soi-même, de ses propres envies, intérêts, attentes… mais en fonction du bonheur de l’autre.

    Une promesse.

    Ce commandement de donner sa propre vie pour l’autre n’est pas un cachot étroit dans lequel les époux vont se retrouver enfermés pour y croupir à petit feu. C’est exactement le contraire qui est vrai ! Se donner à l’autre, recevoir l’autre, est la voie de la vraie liberté intérieure, de la joie profonde, de la véritable réalisation de soi. Ainsi, ces “oui” que Mathilde et Franck vont se donner tracent pour eux la voie fondamentale d’une vie profondément féconde ; ces “oui” sont pour leur vie personnelle à chacun une promesse d’éclosion !

    Un don .

    Dans l’évangile, le Christ raccorde le commandement de l’amour, il le “branche”, on pourrait dire, pour qu’il fonctionne vraiment, sur le don de sa propre vie. « Aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimés », lui qui le premier donne sa vie pour nous, pour reverser sur notre vie toute la plénitude d’amour qu’il reçoit du Père. Et dans cette célébration c’est la même chose : le don mutuel que Mathilde et Franck vont se faire de leur propre vie, Dieu lui-même vient le brancher sur le don de Son propre Amour, pour leur donner, dès aujourd’hui et dans le futur, de quoi s’aimer. Je fais une analogie un peu “matérielle” pour exprimer la richesse de cela. Souvent, peut-être moins maintenant, les futurs époux font (ou faisaient) une liste de mariage : une liste de choses dont ils ont besoin pour fonder leur vie commune : une machine à laver, un service de tant de couverts,

    cinq casiers de Maredsous triple…

    et les invités leur offrent une de ces choses ou font un versement sur un compte pour qu’ils se procurent ce dont ils ont besoin. Imaginons la stupéfaction d’un couple qui, en regardant le site sur lequel ils ont fait cette liste, découvrirait qu’un grand oncle, juste avant de passer de ce monde au Père, a coché toute la liste à lui tout seul, et leur a versé en plus 100 fois la somme que ça représente : de telle sorte qu’ils auraient de quoi tout se racheter à nouveau 100 fois s’ils en avaient besoin ! Eh bien, par le don de son Amour, le Christ fait cela aujourd’hui, et Il veut continuer à faire cela par la suite pour Mathilde et Franck, par rapport à toutes les ressources d’amour – de patience, de bienveillance, de tendresse, de miséricorde, de pardon… – dont ils ont et auront besoin pour se donner en plénitude l’un à l’autre. C’est un don énorme ! Parce que pour avoir besoin 100 fois à nouveau d’une machine à laver, il faut déjà en passer du temps ensemble !... à moins d’avoir vraiment pas d’bol, mais sinon ça peut prendre cinq siècles !... Mais avoir besoin 100 fois à nouveau de patience, de miséricorde, d’attention… ça peut prendre 15 jours, même quand on a du bol !

    C’est pourquoi aujourd’hui, dans cette liturgie, notamment à travers la bénédiction qui répondra à l’échange des consentements, la prière de l’Église fait ce qu’a fait la prière d’Abraham dans la première lecture : elle arrête le Christ, elle le somme de ne pas passer sans s’arrêter auprès des époux, elle le supplie de prendre leur union dans Ses mains tendres et puissantes à la fois, elle le prie de rester à leur côté, en toute circonstance pour rendre toujours plus féconde la communion de vie et d’amour qu’ils fondent aujourd’hui.

    Père Damien Nivelle (juillet 2017)