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  • Corps du Christ … à la maison

    J’ai lu ou entendu quelque part, peu importe, que quelqu’un, confiné comme nous tous, un dimanche, a « participé » à l’Eucharistie devant la télé où la messe était diffusée. Au moment de la communion, il a pris un morceau de pain et l’a mangé. Les théologiens patentés discuteront pour savoir s’il a « communié réellement au Corps du Christ ».

    Pour moi, la réponse ne fait pas l’ombre d’un doute : c’est OUI. Pourquoi ? Par tout son être, il était en communion avec tous ceux qui étaient, comme les autres téléspectateurs, confinés dans leur maison. Il a posé un signe (mot que je préfère à rite) : celui du pain partagé. Cette réflexion, par rapport à l’Eucharistie, me fait sortir de son aspect magique et religieux où le prêtre-magicien a seul le pouvoir de « transformer » le pain et le vin en Corps et Sang du Christ. L’Eucharistie, c’est l’action d’un « Peuple rassemblé », et pas seulement l’action d’un grand sorcier à qui on a donné un pouvoir. Ce serviteur (ministre) a reçu la mission/service de rassembler un peuple (Corps du Christ) qui, à son tour, aura pour mission d’être signe d’un Christ à venir où chaque être humain est appelé, librement, à devenir membre. C’est ça d’abord l’Eucharistie – la Messe sur le monde.

    Dans ce qui va suivre, je n’ai nullement l’intention de transformer les gens en « chrétiens qui s’ignorent ». Nous voyons, autour de nous et à la télé, de magnifiques fleurs de solidarité, autrement dit « faire corps ». Nous entendons des rappels à la plus grande prudence par des gestes qui sauvent. On nous demande de ne pas oublier le personnel soignant … mais pas que … Tout cela, ces gens l’accomplissent au titre de leur HUMANITE. Il nous faut sortir très vite du « religieux » qui seul, sauverait. Un des grands mérites de Mt 25, c’est, par les gestes énumérés, de « relier » les gens à Dieu, sans qu’ils le sachent (ils le sauront quand Dieu le leur dira : « Quand t’avons-nous vu… ? Chaque fois que vous l’aurez fait aux plus petits qui sont les miens, c’est à moi que vous l’avez fait »). Certains ont donné ou donnent leur vie. Est-ce pour nous étranger à la Passion du Christ ? « Il n’y a pas de plus grand amour se ‘déprendre’ de sa vie pour ceux qu’on aime » (Jn 15, 13). Je n’oublie pas la deuxième partie de Mt 25. Nous constatons que l’aveuglement, le repli sur soi, le pouvoir de l’argent qui corrompt tout, est là, à notre porte … et sans doute aussi en nous.

    Le « Dieu » auquel nous croyons ne s’enferme pas dans une religion. Il nous dépasse infiniment et de partout. Les « religieux » n’en sont pas propriétaires, et surtout pas les seuls propriétaires. Notre humble mission, c’est, comme le dit Serge Baqué, de la CMDF (Mission de France) : « Va voir là-bas si j’y suis ». Nous aurons alors l’heureuse surprise de voir que le visage de Dieu, c’est le visage de l’HOMME, avec ses balafres, ses amputations, ses souffrances, ses « virus » bien plus dangereux que le Covid 19 : « Il a pris sur lui nos infirmités, Il s’est chargé de nos maladies » ‘Mt 8, 17

    Ma réflexion à partir d’un « geste eucharistique » ne m’a pas mis en-dehors du monde des êtres humains. Heureusement ! C’est le seul monde qui compte pour le Christ : Il est venu pour lui dire l’amour de son Père. Il nous confie la tâche, enthousiasmante mais combien difficile, d’être sa VOIE, souvent silencieuse : qui saura le moment opportun pour le dire explicitement ? Il nous faudra sans doute inscrire en nous la patience et continuer humblement notre chemin d’humanité, sans vouloir donner de leçon à personne.

    Mais, si chacun, de par son baptême qui le fait participer au sacerdoce universel, est appelé à accomplir cette mission, nous devons sans cesse nous rappeler que c’est une mission communautaire. En ce moment de grand bouleversement, il nous faudra trouver des temps et des moyens nouveaux, vraiment nouveaux, pour « faire corps ». Je voulais dire « Faire Eglise ». J’accepte cette expression à condition de nous laisser bousculer, chambouler par la « Tempête de l’Esprit », cet Esprit qui souffle où il veut (Jn 3, 8).

    C’est ma réflexion de ce matin 28 mars. Prière ou non, je suis incapable de le dire. Un Autre, seul, le sait. Je vous l’envoie parce que, déjà, nous avons partagé. Partage qui deviendra pour moi, physiquement, de plus en plus difficile. Celui qui nous rassemble tous est en mesure de nous faire dépasser nos limites.

    Joseph Chesseron
    28 mars 2020


    Joseph,

    Frère en Christ,
    Merci de ton message
    Juste , une courte réflexion. L’eucharistie ne vaut que par la foi de ceux qui la partagent. Le rite est second, il diffère d’une communauté à l’autre : romain, maronite, orthodoxe, réformée...
    Ce rite est important à respecter, il fait sens dans la communauté. Je partage ce respect pour une eucharistie " vécue " le dimanche à la télévision. Elle est authentique pour tout ceux qui sont dans l’incapacité à ma messe paroissiale.Bien à toi.
    Pierre