• Logo
  • TOUSSAINT

    Apocalypse de saint Jean – 7, 2-4 [5-8] 9-14

    A chaque fête de Toussaint, la liturgie nous propose, en première lecture, un texte mystérieux tiré de l’Apocalypse de saint Jean. On peut l’ignorer sous prétexte qu’il est trop difficile. On peut aussi se lancer dans des explications savantes qui n’intéressent personne. On peut enfin essayer de comprendre son message, message adressé aux premières communautés chrétiennes, message pour nous aussi aujourd’hui. C’est ce que, sans prétention, nous allons essayer de faire.

    Moi, Jean, j’ai vu un ange qui montait du côté où le soleil se lève, avec le sceau qui imprime la marque du Dieu vivant ; d’une voix forte, il cria aux quatre anges qui avaient reçu le pouvoir de dévaster la terre et la mer : " Ne dévastez pas la terre, ni la mer ni les arbres, avant que nous ayons marqué du sceau le front des serviteurs de notre Dieu. " Et j’entendis le nombre de ceux qui étaient marqués du sceau : ils étaient cent quarante-quatre mille douze mille de chacune des douze tribus d’Israël.[vv.5 à 8 : les noms des 12 tribus d’Israël] Après cela, j’ai vu une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, une foule de toutes nations races, peuples et langues. Ils se tenaient debout devant le Trône et devant l’Agneau, en vêtements blancs, avec des palmes à la main. Et ils proclamaient d’une voix forte : " Le salut est donné par notre Dieu, lui qui siège sur le Trône, et par l’Agneau ! " Tous les anges qui se tenaient en cercle autour du Trône, autour des Anciens et des quatre Vivants, se prosternèrent devant le Trône, la face contre terre, pour adorer Dieu. Et ils disaient : " Amen ! Louange, gloire, sagesse et action de grâce, honneur, puissance et force à notre Dieu, pour les siècles des siècles ! Amen ! " L’un des Anciens prit alors la parole et me dit : " Tous ces gens vêtus de blanc, qui sont-ils, et d’où viennent-ils ? " Je lui répondis : " C’est toi qui le sais, mon Seigneur. " Il reprit : " Ils viennent de la grande épreuve ; ils ont lavé leurs vêtements, ils les ont purifiés dans le sang de l’Agneau. "

    Apocalypse ?

    Ce mot est devenu, à tort, en français, synonyme de catastrophe. En fait, bien au contraire, il signifie « dévoilement », révélation d’un message d’espérance. Cette façon de s’exprimer ne nous est pas familière. On la trouve dans la Bible (Ezékiel – Daniel…) et hors de la Bible. C’est une manière de regarder le temps présent à la lumière de ce que le Père veut pour la réussite complète de l’humanité, par Jésus, son Fils. L’auteur est censé avoir eu une ou plusieurs visions, plus ou moins grandioses, qu’il raconte à ses lecteurs. Les images qu’il utilise n’ont rien à voir avec une réalité visible ou palpable. Par exemple, les images de destruction veulent exprimer la colère de Dieu contre tout ce qui s’oppose au bien qu’il veut réaliser pour l’humanité et pour la création tout entière.

    Au fil du texte : quelques expressions importantes

    La foule des sauvés (marqués par le sceau) : c’est le nouveau peuple de Dieu, symbolisé par les 12 tribus d’Israël. Le chiffre 12 multiplié par lui-même (144) est une sorte de superlatif ; 1000 signifie un nombre incalculable : 144.000. Ce nouveau peuple de Dieu, s’enracine dans l’histoire du Peuple d’Israël. Jésus en est issu.
    Mais le nombre des sauvés est infiniment plus grand : il comprend tous ceux qui, venant de partout, (une foule de toutes nations races, peuples et langues) font déjà partie de ce peuple, ainsi que ceux qui, dans l’avenir, viendront l’agrandir à l’infini.

    Les robes blanches : ce terme fait sans doute allusion au baptême. Cependant, à cause de l’expression : « Ils ont lavé leurs vêtements, ils les ont purifiés dans le sang de l’Agneau », peut-être s’agit-il aussi de ceux qui ont témoigné du Christ jusqu’à verser leur sang lors de la première persécution qu’ont eu à subir les premiers chrétiens dans les années 80-90, sous l’empereur romain Domitien, ainsi que ceux qui témoigneront de lui au cours du temps.

    Le centre de toute la vision : « Ils se tenaient debout devant le Trône et devant l’Agneau ». Ce qui est au centre de ce récit de vision, c’est le Trône. C’est une autre manière de nommer Dieu, Le trône désigne celui qui y prend place. C’est vers Lui que se tournent les messagers de Dieu (les anges), une manière de dire que toute la Création est orientée vers Dieu et trouve son existence en Lui.

    L’Agneau  : remarquons bien que l’Agneau immolé est mis sur le même plan que celui qui siège sur le Trône. Il reçoit les mêmes signes d’honneur que Lui ; autrement dit, il est présenté comme l’égal de Dieu. Dans la tradition chrétienne, et plus spécialement dans la littérature attribuée à Jean, l’Agneau, c’est le Christ Jésus. En Jn 1, 36, Jean Baptiste le présente ainsi à ses disciples qui deviendront disciples de Jésus : « Voici l’agneau de Dieu ». Il fait allusion au texte du prophète Isaïe présentant le Serviteur de Dieu comme l’agneau qui, sans rient dire, se laisse conduire à la boucherie. Pour les premières communautés Chrétiennes, cette allusion est claire : cet Agneau, c’est Jésus donnant sa vie sur la croix, dont le cœur transpercé laisse échapper du sang et de l’eau (autre allusion au baptême).

    Pour nous aujourd’hui

    Nous sommes ce peuple immense que l’Écriture qualifie de Saints, non à cause de nos mérites, non parce que nous serions purs de tout péché, mais parce que l’amour de Dieu notre Père, par la vie donnée de Jésus Christ, nous revêt de son Esprit. Pécheurs nous le sommes, mais à cause de l’amour gratuit de Dieu, il nous est offert et donné de vivre en enfants de Dieu. A nous, humblement, de répondre à cet amour. C’est bien pourquoi cette fête de la Toussaint est notre fête, dès lors que nous acceptons d’entrer dans le projet de Dieu pour nous.

    Joseph CHESSERON