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  • Et si nous lisions ensemble.... la Bible (19)
    Revenir à "Et si nous lisions ensemble.... la Bible" (18) : La mission de Moïse

    La révélation du nom ineffable (Ex 3, 13-22)


    Dans sa mission, Moïse va être confronté à deux oppositions :
    - paradoxalement, celle des fils d’Israël, alors qu’il leur est envoyé pour les délivrer de l’esclavage d’Égypte,
    - et celle de Pharaon qui, bien entendu, ne veut pas se passer d’une main-d’œuvre servile.

    Moïse a bien conscience qu’il ne peut s’imposer aux fils d’Israël et à Pharaon de sa propre autorité. Il doit prouver sa mission en donnant le nom du dieu qui l’envoie. Ce n’est pas n’importe quel dieu ; il a un nom.

    Pour prouver sa mission divine, Moïse doit, d’autre part, faire la preuve que la puissance de Dieu lui a été déléguée (cf. Ex 4, 29-31).

    A partir de là, il provoquera des événements qui feront plier Pharaon. Cette demande (qui sollicite la communication du nom du dieu) des fils d’Israël n’est-elle pas aussi celle de Moïse lui-même ? Ne manifeste-t-il pas aussi lui-même des doutes sur l’identité de son mandataire et la réalité de sa puissance ? D’autant que Moïse n’a pas vraiment envie de partir en mission. En effet, c’est à Moïse, d’abord, que le nom est révélé, c’est à Moïse, d’abord, qu’est manifestée la toute puis­sance de Dieu. Et c’est à Moïse qu’est confiée la mission de faire sortir le peuple de la "maison de servitude".

    Donner un nom
    Le nom n’est pas une simple désignation, une simple étiquette.

    En France, nous choisissons le nom d’un enfant en fonction de sa beauté, de sa sonorité, sans considération véritable de sa signification.

    Les Anciens, au contraire, attribuaient un nom après réflexion, parce qu’il était signifiant. On désignait les lieux (Babel, le lieu où YHWH « brouilla la langue de toute la terre » (Gn 11, 9), les animaux (Adam nomme les ani­maux que Dieu lui présente), les hommes, par une qualité, par un événement, par le souhait d’un avenir. : Adam (celui qui est tiré de la terre) ; Jacob (celui qui gagne le combat) ; Josué, Isaïe, Jésus, (YHWH sauve ou Que YHWH sauve !). « Le nom dit de la personne dans sa profondeur… Aussi connaître le nom de quelqu’un, c’est avoir accès aux mystères de son être et même le dominer en quelque sorte » (Xavier Léon-Dufour, Dictionnaire du Nouveau Testament, p. 389).

    Le nom qui dit tout et qui ne dit rien
    Dieu se doit de donner un réponse à celui qu’il appelle comme porte-parole (pro-phète). Dans le cas contraire la mission deviendrait impos­sible.

    Le verbe hébreu distingue deux catégories de formes verbales : l’inaccompli et l’accompli. Cette opposition fait que le présent et le futur, comme ils ne sont pas finis, correspondent à la même forme verbale. Ce qui donne lieu à des traductions différentes mais toutes autant légitimes. On traduit aujourd’hui le texte par :

    "Je suis qui je suis" (la Bible parole de vie). Cela révèle soit l’impossibilité de dire en termes humains l’iden­tité de Dieu soit le refus de la part de Dieu de se laisser enfermé dans une identi­fication fermée.
    _ "Je suis celui qui suis" (la Colombe). Nous avons là l’affirmation que Dieu possède la per­fection de l’être.
    _ "Je serai qui je serai" (Nouvelle Bible Segond),

    "Je suis qui je serai" (Traduction œcuménique de la Bible). On peut découvrir dans cette traduction l’idée que Dieu est maître du temps et qu’il intervient dans l’histoire. On pourrai presque traduire « J’y suis, J’y serai » !

    La révélation du nom de Dieu dit sans dire. Il nous révèle, en tout cas, que nul ne peut mettre la main sur Dieu et que l’homme ne finira jamais de le connaître. D’autre part, le nom de Dieu est imprononçable, parce qu’il est sacré et qu’il ne peut passer par des lèvres im­pures.

    On ne peut ce­pendant pas ne pas désigner Dieu. Les juifs disent alors ADoNai (mon Sei­gneur) ou le Nom par excellence (HaSHeM), ou la Parole (HaDaVaR). Les auteurs chrétiens de la Traduction œcuménique de la Bible ont opté pour "le Seigneur".

    Plus tard, Jésus révélera l’autre nom de Dieu : Dieu est totalement amour (1 Jn, 4,8).

    PS. peut-être ce passage vous semblera-t-il compliqué, mais comment dire l’intensité et la profondeur de cette Révélation dans un récit apparemment fort simple ?
    Alain.