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  • En face du drame humain des migrants qui frappent à la porte de l’Europe, le groupe œcuménique de Niort « Accueil d’urgence de l’Etranger » a éprouvé la nécessité d’asseoir ses convictions chrétiennes et ses actions en allant à la source : « Que nous dit la Bible à propos de l’accueil de l’étranger ? » Notre but n’est pas de donner des leçons à quiconque, mais de nous éclairer nous-mêmes, et, du même coup, d’apporter notre humble contribution à la réflexion de nos Eglises.

    Introduction : Un message qui s’inscrit dans l’histoire d’un peuple.

    Pour commencer, « une histoire », puis un rappel qui éclaire toute la suite.

    - Une « histoire » (les savants appellent cela un midrash) : un rabbin raconte que, après le passage de la Mer par les hébreux et la noyade des Egyptiens, Moïse et les hébreux se mirent à chanter un cantique au Seigneur qui les a sauvés. Les anges auprès de Dieu voulurent s’unir à ce cantique. Mais les Seigneur les en empêcha, « car, dit-il, les noyés dans la Mer sont aussi mes enfants. » Universalisme…

    - un rappel : l’histoire de la relation du peuple de la Bible avec le reste de l’humanité commence en Gn 12, 3 : « Dieu dit à Abram : ‘Je bénirai ceux qui te béniront, qui te bafouera je le maudirai ; en toi seront bénies toutes les familles de la terre.’ » Cette histoire trouvera son plein épanouissement dans la parole de Paul aux Galates (Ga 3, 28) : « Il n’y a plus ni Juif, ni Grec ; il n’y a plus ni esclave, ni homme libre ; il n’y a plus l’homme et la femme ; car tous, vous n’êtes qu’un en Jésus Christ. » Universalisme…

    Entre ces deux pôles, se déploie progressivement le message biblique concernant la relation qui doit s’instaurer entre les humains. Nous écouterons en premier lieu ce que nous dit l’Ancien Testament. Puis nous ferons résonner le message de Jésus que « mettra en musique » l’Eglise en ses débuts.

    I - Ancien Testament

    1 - Au cœur d’une histoire tourmentée … comme la nôtre.

    Le message biblique s’inscrit dans l’histoire d’un peuple en tout semblable à la nôtre.

    - Ses ancêtres sont des migrants : Gn 12, 1 : « Le Seigneur dit à Abram : ‘Pars de ton pays, de ta famille, de la maison de ton Père, et va vers le pays que je te ferai voir’ ». Jacob fuit son frère Esaü, se constitue une famille auprès de son oncle Laban dont il épouse les filles, avant de revenir en Canaan (Gn, ch. 27 à 34). Son fils préféré, Joseph, (Gn, ch. 37 à 47) est vendu par ses frères, puis finit par faire la carrière que l’on sait en Egypte, avant que ses frères ne viennent l’y rejoindre et y constituer un peuple important.

    - Il devient si important que les Egyptiens le réduisent en esclavage et, sous la conduite de Moïse, il doit fuir et errer pendant 40 ans dans le désert. Le livre de l’Exode nous raconte cette histoire. L’humanité d’hier comme celle d’aujourd’hui ne cesse d’être une humanité errante.

    - les livres de Josué, des Juges, de Samuel et des Rois sont à prendre avec beaucoup de précaution. Ils apparaissent comme une suite de violences, de massacres, de guerres … apparemment ordonnés par Dieu, en direction des pays voisins, en particulier les Philistins. Est-ce que Dieu approuve tout cela, ou est-ce qu’il veut « faire avancer son message » à travers une humanité caractérisée par une extrême violence … comme la nôtre, et non à travers une humanité idéalisée ? Ce sont des sages (que les savants appellent « deutéronomistes ») qui réfléchissent à cette histoire, et qui découvrent, au fond, quelle est la volonté de Dieu pour son peuple, et donc pour toute l’humanité.

    2- Des guerres petites ou grandes … et des gens qui passent ou qui restent.
    (quelques leçons de l’Exode, du Lévitique et du Deutéronome)

    Canaan est un petit pays tiraillé entre les grandes puissances du moment : l’Egypte au sud ouest et l’Assyrie (puis la Babylonie) au nord est. Aux guerres avec les voisins proches, s’en ajoutent d’autres, plus importantes encore. Pays de passage, il n’est donc pas étonnant que Canaan voie arriver de partout des étrangers. Les sages, au nom de Dieu, disent l’attitude à adopter à leur égard. Voici, de façon très incomplète, quelques uns de leurs ordres ou conseils :

    - Dt 14, 28-29 : « Au bout de trois ans, tu prélèveras toutes les dîmes de tes récoltes de cette année-là et tu les déposeras à tes portes. Viendront alors manger … l’étranger, l’orphelin et la veuve, et ils s’en rassasieront… »

    - Dt 24, 19-22 : « Lorsque tu feras la moisson de ton champ, si tu oublies une gerbe au champ, ne reviens pas la chercher. Elle sera pour l’étranger, l’orphelin et la veuve, afin que Yahvé ton Dieu te bénisse dans toutes œuvres. … Tu te souviendras que tu as été en servitude au pays d’Egypte ; aussi je t’ordonne de mettre cette parole en pratique. »

    - Ex 22, 20 : «  Tu n’exploiteras ni n’opprimeras pas l’émigré, car vous avez été émigrés au pays d’Egypte »

    - Lev 19, 33 : « Quand un émigré viendra s’installer chez toi, dans votre pays, vous n’e l’exploiterez pas ; cet émigré installé chez vous, vous le traiterez comme un indigène, comme l’un de vous. Tu l’aimeras comme toi-même, car vous-mêmes vous avez été des émigrés dans le pays d’Egypte. C’est moi, le Seigneur votre Dieu. »

    - Dt 24, 17-18 : « Tu ne biaiseras pas avec le droit d’un émigré et d’un orphelin … Tu te souviendras qu’en Egypte tu étais esclave et que le Seigneur ton Dieu t’a racheté de là. C’est pourquoi je t’ordonne de mettre en pratique cette parole. »

    - Dt 10, 19 : «  Vous aimerez l’émigré, car au pays d’Egypte vous étiez des émigrés. »


    3- Fermetures et ouvertures … comme en notre temps

    Le message biblique n’est pas rectiligne : il épouse le fil de l’histoire du peuple. Ainsi, au retour de l’Exil à Babylone, Il a fallu « resserrer les boulons », car ce peuple risquait de laisser sa religion être contaminée par ce que la Bible appelle « les gens du pays » dont la religion était teintée d’idolâtrie. Dans les livres d’Esdras et de Néhémie, on trouve des lois qui nous surprennent ; Il est interdit d’épouser une étrangère et si un homme a déjà épousé une étrangère, il devra la répudier.

    Cette fermeture se retrouvera jusqu’à la période du Christ, notamment dans le courant pharisien.
    Cependant, à la même époque, un courant d’ouverture s’exprime.

    a- Le livre de Ruth, d’après les spécialistes, aurait été écrit pour contrer les « intégristes » de l’époque. Dans le récit, cette jeune Moabite, étrangère, fait cause commune avec sa belle-mère juive, l’accompagne à son retour à Bethléem, finit par épouser Booz et deviendra l’ancêtre de Jessé … père de David !

    b- Et que dire du merveilleux livre de Jonas ? A contrecœur, ce prophète rebelle appelle à la conversion Ninive, l’ennemie par excellence … et sa prédication est efficace ! Nul n’est exclu de la miséricorde de Dieu.

    c- Enfin ces signes d’ouverture se retrouvent chez des prophètes (Jérémie ou Esaïe) :
    - Jr 22, 3 : « Ainsi parle le Seigneur : ‘Défendez le droit et la justice, libérez le spolié du pouvoir de l’exploiteur, n’opprimez pas, ne maltraitez pas l’Immigré, l’orphelin et la veuve, ne répandez pas le sang innocent en ce lieu !’ »
    - Le prophète Esaïe se met à rêver (et comment ne rêverions-nous pas avec lui ?) Es 19, 24-25 : « Ce jour-là, Israël viendra le troisième, avec l’Egypte et l’Assyrie. Telle sera la bénédiction que, dans le pays, prononcera le Seigneur, le tout-puissant : ‘Bénis soient l’Egypte, mon peuple, l’Assyrie, l’œuvre de mes mains, et Israël, mon patrimoine’ ».

    II - Nouveau Testament


    A - Avec Jésus, l’ouverture définitive

    Jésus est un Juif comme les autres. Il pratique la religion juive et se rend régulièrement à la synagogue Tout en respectant la Loi, il se montre libre avec elle. Rappelons-nous sa liberté à l’égard du sabbat. Ses adversaires le lui reprocheront sans cesse et ne lui pardonneront pas cette parole (Mc 2, 27) : « Le sabbat est fait pour l’homme et non pas l’homme pour le sabbat ». Cette liberté lui permettra de rencontrer qui il voudra, y compris les étrangers.

    1- La Cananéenne (ou Syro-phénicienne)
    Parmi ses rencontres avec des étrangers, retenons seulement dans un premier temps sa confrontation avec la Cananéenne (Mt 15, 21-28). Cette étrangère lui demande la guérison de sa fille. Jésus la rabroue : « Il n’est pas bon de donner aux chiens le pain des enfants. » Mais elle répond : « Les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table des enfants. » « Femme, ta foi est grande ! Qu’il t’arrive comme tu le veux ». La rencontre avec cette étrangère semble avoir fait découvrir à Jésus la dimension plénière de sa mission : il est venu pour tous les hommes.

    2- Les félicitations aux étrangers
    - Lc 7, 9 : un centurion lui demande la guérison de son serviteur avec une telle confiance que Jésus dit : « Je vous le déclare : même en je Israël n’ai pas trouvé une telle foi. »
    - Mc 5, 1-20 : Jésus part en terre étrangère, de l’autre côté du Lac de Tibériade. Là, il guérit un possédé du démon, qui veut le suivre par reconnaissance. (v 19) : « Jésus ne le lui permit pas, mais il lui dit : ‘Va dans ta maison auprès des tiens et rapporte-leur tout ce que le Seigneur a fait pour toi dans sa miséricorde’ ». Jésus fait de cet homme païen le premier missionnaire en terre étrangère. La Mission n’a pas de frontière.
    - Lc 17, 11-19 : Jésus guérit dix lépreux en leur ordonnant d’aller voir les prêtres pour faire constater leur guérison. Se voyant guéri, l’un d’eux, un Samaritain, retourne immédiatement auprès de Jésus pour lui montrer sa reconnaissance. Jésus s’étonne (v 17-18) : « Est-ce que tous les dix n’ont pas été purifiés ? Et les neuf autres, où sont-ils ? Il ne s’est trouvé personne pour venir rendre gloire à Dieu : il n’y a que cet étranger. »

    3- Encore les Samaritains

    En Israël, il y avait, toute proportion gardée, autant de méfiance et de rejet à l’égard des Samaritains que, aujourd’hui, dans certains milieux en France et en Europe, à l’égard des Arabes et des Musulmans.

    a- La parabole du bon Samaritain (Luc 10, 25-37)
    Nous nous permettons de la citer en entier, tellement elle est capitale dans le message de Jésus à l’égard des étrangers.
    25 Et voici qu’un docteur de la Loi se leva et mit Jésus à l’épreuve en disant : « Maître, que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle ? » 26 Jésus lui demanda : « Dans la Loi, qu’y a-t-il d’écrit ? Et comment lis-tu ? » 27 L’autre répondit : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de toute ton intelligence, et ton prochain comme toi-même. » 28 Jésus lui dit : « Tu as répondu correctement. Fais ainsi et tu vivras. » 29 Mais lui, voulant se justifier, dit à Jésus : « Et qui est mon prochain ? »
    30 Jésus reprit la parole : « Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et il tomba sur des bandits ; ceux-ci, après l’avoir dépouillé et roué de coups, s’en allèrent, le laissant à moitié mort. 31 Par hasard, un prêtre descendait par ce chemin ; il le vit et passa de l’autre côté. 32 De même un lévite arriva à cet endroit ; il le vit et passa de l’autre côté. 33 Mais un Samaritain, qui était en route, arriva près de lui ; il le vit et fut saisi de compassion. 34 Il s’approcha, et pansa ses blessures en y versant de l’huile et du vin ; puis il le chargea sur sa propre monture, le conduisit dans une auberge et prit soin de lui. 35 Le lendemain, il sortit deux pièces d’argent, et les donna à l’aubergiste, en lui disant : “Prends soin de lui ; tout ce que tu auras dépensé en plus, je te le rendrai quand je repasserai.” 36 Lequel des trois, à ton avis, a été le prochain de l’homme tombé aux mains des bandits ? » 37 Le docteur de la Loi répondit : « Celui qui a fait preuve de pitié envers lui. » Jésus lui dit : « Va, et toi aussi, fais de même. »

    Que dire de plus ? Jésus présente l’ennemi héréditaire comme étant plus apte à la miséricorde (les tripes nouées !) que les représentants de la religion ! L’Esprit est à l’œuvre au cœur de tout homme, aujourd’hui encore !


    b- L’entretien avec la Samaritaine (Jean 4, 1-42)

    De cette rencontre de Jésus, au puits de Jacob, avec une femme de Samarie, retenons seulement le passage qui concerne le culte :
    20 Eh bien ! Nos pères ont adoré sur la montagne qui est là, et vous, les Juifs, vous dites que le lieu où il faut adorer est à Jérusalem. » 21 Jésus lui dit : « Femme, crois-moi : l’heure vient où vous n’irez plus ni sur cette montagne ni à Jérusalem pour adorer le Père. 22 Vous, vous adorez ce que vous ne connaissez pas ; nous, nous adorons ce que nous connaissons, car le salut vient des Juifs. 23 Mais l’heure vient – et c’est maintenant – où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et vérité : tels sont les adorateurs que recherche le Père. 24 Dieu est esprit, et ceux qui l’adorent, c’est en esprit et vérité qu’ils doivent l’adorer. » 25 La femme lui dit : « Je sais qu’il vient, le Messie, celui qu’on appelle Christ. Quand il viendra, c’est lui qui nous fera connaître toutes choses. » 26 Jésus lui dit : « Je le suis, moi qui te parle. »
    Une fois de plus, Jésus « fait bouger les lignes », y compris à l’intérieur de la religion. Jésus est un homme libre, qui ne se laisse enfermer dans aucun carcan, fût-il religieux (adoration en esprit et en vérité), national (il parle à une samaritaine), ou sexuel (il parle à une femme, au grand étonnement de ses disciples). Puissent nos Eglises vivre de cette liberté qu’il nous apporte… et qu’il apporte à toute l’humanité !


    4- Le « Jugement Dernier » (Matthieu 25, 31-40)

    Dans ce passage bien connu, Jésus ne se rapporte à aucune démarche de type religieux. Dans la pure tradition biblique, il demande que l’on sache voir ceux qui ont faim ou soif, ceux qui viennent d’ailleurs (l’étranger), ceux qui sont malades ou en prison qui ont besoin d’être accueillis, mais il va infiniment plus loin : Il s’identifie à eux : (v 40) : « … chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits, qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. » Mon frère l’étranger qui frappe à ma porte, c’est le Christ. Saurons-nous lui ouvrir notre cœur et nos mains ?

    En conclusion de ce bref parcours évangélique, rappelons que Matthieu (27, 54), Marc (15, 39) et Luc (23, 47), après la mort de Jésus sur la croix, mettent dans la bouche d’un païen étranger, le centurion romain, l’occupant, la profession de foi de l’Eglise : « Vraiment cet homme était le Fils de Dieu. » La Croix est marquée au sceau de l’universalisme.

    B- L’Eglise en ses débuts « met en musique » le message de Jésus

    La plus grande difficulté à laquelle l’Eglise, en ses débuts, a été confrontée fut l’accueil de l’autre, de l’étranger. Les tout premiers chrétiens étaient exclusivement des Juifs. Mais très vite, à la suite de la mort d’Etienne, l’Eglise dut se disperser, d’abord en Samarie (de nouveau !), puis dans le monde grec et romain. Retenons seulement deux épisodes de cette histoire.

    1- Pierre et le centurion Corneille (Actes – ch. 10 et 11, 1-18)

    a- à Césarée. Pierre, à la suite d’une vision étrange lui ordonnant de manger des aliments que la religion juive considérait comme impurs, est invité à aller à Césarée chez un centurion de l’armée romaine nommé Corneille. Celui-ci a eu, lui aussi une vision, où il était invité à faire venir Pierre. Voilà que tout s’éclaire : le païen Corneille n’est plus considéré comme impur, car il est appelé à entrer dans la Voie du Seigneur Jésus. Pierre lui annonce, à lui et à sa famille, le salut en Jésus Christ mort et ressuscité. Pendant qu’il est en train de parler, l’Esprit, comme en une deuxième Pentecôte, descend sur cette assemblée de païens, ce qui fait dire à Pierre (10, 41) : « Quelqu’un pourrait-il empêcher de baptiser par l’eau ces gens qui, tout comme nous, ont reçu l’Esprit Saint ? » Et Pierre les fait baptiser au nom du Seigneur Jésus. Corneille et sa famille sont les premiers chrétiens d’origine païenne.

    b- à Jérusalem. La communauté de Jérusalem a eu vent de cette initiative de Pierre et lui demande des comptes. Pierre vient rencontrer cette communauté, lui explique ce qui s’était passé et termine son discours par ces mots (11, 17) : « Si Dieu a fait à ces gens le même don gracieux qu’à nous autres pour avoir cru au Seigneur Jésus Christ, étais-je quelqu’un, moi, qui pouvait empêcher Dieu d’agir ? » le calme revient dans la communauté ; à son tour, elle entre dans le plan de Dieu (11, 18) : « Voilà que Dieu a donné aussi aux nations païennes la conversion qui mène à la vie ! » Une Eglise ouverte à tous, sans restriction : telle est bien la volonté de Dieu.

    2- Le conflit d’Antioche : deux récits bien différents (Actes 15, 1-35 ; Galates 2, 11-21)

    a- le récit des Actes. Dans cette communauté toute nouvelle d’Antioche, cohabitent des chrétiens d’origine juive et païenne. Des gens venant de Jérusalem veulent imposer la circoncision aux païens, c’est-à-dire les faire passer par la religion juive. Paul et Barnabas s’y opposent. Mandatés par la communauté, ils se rendent à Jérusalem et exposent le problème. C’est Pierre qui, par son discours, amène à la solution. Il rappelle son rôle dans la conversion de Corneille et affirme (15, 9) : « Sans faire la moindre différence entre les nations païennes et nous, c’est par la foi qu’il a purifié leurs cœurs. » L’assemblée se range à son avis. Paul et Barnabas peuvent retourner à Antioche. Ils sont porteurs d’une lettre libératrice, dont nous ne retenons qu’une seule phrase (11, 28) : « L’Esprit Saint et nous-mêmes, nous avons décidé de ne vous imposer aucune charge supplémentaire (i.e. la circoncision). » Il n’y a plus de barrières entre les membres de cette communauté.

    b- le récit de la lettre aux Galates. Paul dénonce vigoureusement l’attitude de Pierre (appelé ici Céphas) qui fréquente les chrétiens d’origine païenne et mange avec eux, mais change totalement de comportement quand arrivent les « intégristes » de Jérusalem. En quelque sorte, Paul lui dit : « Tu dois choisir entre la foi en Christ qui abolit toutes les barrières, ou la supériorité de la religion juive symbolisée par la circoncision ». Paul a choisi résolument la foi en Christ (Gal 2, 20-21) : « Avec le Christ, je suis un crucifié ; je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi » sinon … « si c’est par la loi (la circoncision) qu’on atteint la justice, c’est donc que le Christ est mort pour rien. » Autrement dit, c’est par la foi au Christ que sont abolies toutes les divisions entre les êtres humains.

    Conclusion : En Christ, l’Eglise construit, avec d’autres, un monde sans frontières.

    A la fin de ce parcours biblique, sans doute bien incomplet, nous affirmons, humblement mais fermement, que le chantier des chrétiens de toutes confessions, toujours à reprendre à nouveaux frais, c’est de construire un monde de fraternité, où la différence n’est pas vue comme un obstacle mais une chance. Nous rejoignons des femmes et des hommes qui ne partagent pas notre foi. Ils arrivent sur ce chantier par d’autres voies que nous. Le fondement de notre foi et de notre action, nous le trouvons, quant à nous, dans l’affirmation de cette même lettre de Paul aux Galates par laquelle nous avons commencé : (Ga 3, 28)  : « Il n’y a plus ni Juif, ni Grec ; il n’y a plus ni esclave, ni homme libre ; il n’y a plus l’homme et la femme ; car tous, vous n’êtes qu’un en Jésus Christ. »