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  • VIVRE LA FOI : L’ALLIANCE (suite)

    Pour dire la Relation de Dieu avec les hommes, la Bible utilise une réalité de la société civile : l’Alliance. Entre les nations sont signés des traités, souvent imposés par les vainqueurs aux vaincus. C’est un rapport de suzerain à vassal. Comme prix de la protection accordée par le premier, le second est tenu à un certain nombre de devoirs.

    De cette image de l’Alliance, la Bible évacue ce qui pourrait apparaître comme négatif (la relation vainqueur – vaincu), pour retenir le positif : Dieu prend l’initiative de la protection accordée à l’humanité entière (l’Alliance avec Noé – Gn 9, 8-17), à la descendance d’Abraham (Gn 15, 19), à son peuple qui vient de sortir d’Egypte sous la conduite de Moïse (Ex 24, 1-11).

    Mais, le plus souvent, le peuple est infidèle à l’Alliance. Cette infidélité conduit au drame de la ruine de Jérusalem en 587 av. J.C.. Dieu, lui, reste fidèle, et annonce une Alliance Nouvelle, par le prophète Jérémie (Jr 31, 31-34).

    Cette Alliance Nouvelle, nous les chrétiens, nous croyons qu’elle est définitive (éternelle) par Jésus Christ. Nous le rappelons à chaque Eucharistie (cf. Mt 26, 26-29). La Lettre aux Hébreux (He 10, 9-18) nous en présente toute la portée.

    Nous revenons sur ces textes, présentés dans la fiche précédente, pour mieux les comprendre et en voir l’actualité pour nous aujourd’hui.

    Alliance du Sinaï (Exode 24, 1-11)

    Dans ce récit, soulignons deux choses :

    - Dieu parle ; Moïse transcrit la parole et la transmet au peuple. C’est donc Dieu qui prend l’initiative de l’Alliance. Le peuple, lui s’engage à la respecter : " Toutes les paroles que le Seigneur a dites, nous les mettrons en pratique. "

    - Le rite qui « signe »l’Alliance est celui du sang. Pourquoi le sang ? Pour les Israélites, c’est le ‘lieu’ de la vie et seul Dieu est maître de la vie. Le fait d’asperger l’autel, puis le peuple, du sang des animaux offerts, établit un lien indissoluble entre Dieu et son peuple.

    Retenons aussi la place éminente de Moïse dans la conclusion de l’Alliance. Nous nous en souviendrons quand nous parlerons de Jésus.

    la Nouvelle Alliance selon Jérémie (Jr 31, 31-34).

    L’Histoire du peuple d’Israël est, le plus souvent, la longue Histoire de la désobéissance à l’Alliance (un peuple à la nuque raide). Jérémie interprète la chute de Jérusalem comme le châtiment à cette infidélité. Mais, de la part de Dieu, il annonce une Alliance Nouvelle.

    - Elle sera conclue avec la communauté du peuple réunifiée : Israël et Juda.

    - Elle ne sera plus inscrite sur un livre ou gravée sur la pierre. Elle sera dans le cœur même de chacun des membres de la communauté.

    - La connaissance dont parle Jérémie, ce n’est pas d’abord un savoir sur Dieu, mais la relation d’amour quasi charnelle entre Dieu et le croyant. C’est cette connaissance qui sera la base de l’Alliance.

    - Car Dieu fera table rase du passé : le pardon de Dieu ouvre désormais une route toute nouvelle.

    - Dans notre lecture chrétienne, nous y voyons l’annonce de l’Alliance éternelle en Jésus Christ.

    Le dernier repas de Jésus (Matthieu 26, 26-29)

    - Pour les sémites, donc pour Jésus, l’homme est corps et sang, qui, ensemble, représentent la vie, la personne entière. Pain et vin, corps et sang, c’est toute la personne de Jésus.

    - « …mon sang de l’Alliance » rappelle le sang répandu par Moïse sur l’autel et sur le peuple. Mais il y a ici infiniment plus que Moïse : c’est le propre sang de Jésus qui « signe » l’Alliance, une Alliance radicalement nouvelle, celle que Jérémie annonçait.

    - Pour Matthieu, seul le sang du Christ obtient « la rémission des péchés », ce que ne pouvaient obtenir les sacrifices du Temple ou le baptême de Jean Baptiste.

    - Ce sang du Christ est versé «  pour la multitude », à l’image du Serviteur en Isaïe (Is 53, 12) qui prend sur lui le péché « des multitudes ». Par là, nous dépassons le cadre du seul peuple d’Israël, pour étendre le bénéfice du sang versé à l’ensemble de l’humanité, qui est incluse à son tour dans la Nouvelle Alliance..

    - La réalisation complète et définitive s’accomplira à la fin des temps, et les disciples y seront pleinement associés (avec vous).

    L’Alliance en Christ selon la Lettre aux Hébreux (He 10, 9-18)

    Ce texte peut nous servir de résumé :

    - Nous passons de l’Alliance du Sinaï à l’Alliance par Jésus Christ (premier et second culte).

    - Jésus est le seul prêtre capable, par son sacrifice unique, d’enlever les péchés. L’image des ennemis lui servant de marchepied symbolise la victoire du Christ sur le mal et la mort.

    - Cette œuvre est définitive et jusqu’à la fin des temps («  il a mené pour toujours à l’accomplissement ceux qu’il sanctifie ».

    - Cette Alliance ne sera plus inscrite sur les tables de pierre ou dans un livre : «  En donnant mes lois, c’est dans leurs cœurs et dans leur pensée que je les inscrirai ».

    - Jésus réalise définitivement ce que Jérémie annonçait : «  Je pardonne leur crime ; leur faute, je n’en parle plus. »

    - Par l’offrande du Christ, nous sommes sûrs d’entrer dans l’intimité même de Dieu : «  Nous avons ainsi, frères, pleine assurance d’accéder au sanctuaire par le sang de Jésus. »

    Quel message pour les hommes d’aujourd’hui ?

    - Dans un monde sans perspective, Dieu veut inscrire son action avec les hommes dans la durée. En Jésus Christ, par le sang de la croix, l’engagement est définitif, unilatéral et inconditionnel. L’Eucharistie est le rappel (mémorial) de ce qui a été acquis une fois pour toutes par l’acte unique du sacrifice de la croix, et l’annonce de ce qui sera définitivement accompli à la fin des temps.

    - Dans un monde du « prendre », de la possession, Dieu veut inscrire son action dans le don, la gratuité. «  Nul n’a d’amour plus grand que celui qui se dessaisit de sa vie pour ceux qu’il aime ».dit Jésus (.Jn 15, 13)

    - Dans un monde du « paraître », Dieu veut inscrire son action au plus profond de l’être humain : «  Je mettrai ma loi au dedans d’eux, je l’écrirai sur leur cœur ».

    - Dans un monde où prime l’individualisme et le chacun pour soi, Dieu veut inscrire son action dans et par un peuple : « Je serai leur Dieu, et eux, ils seront mon peuple ». C’est en tant que peuple que, par l’Eucharistie, nous rendons témoignage de l’amour infini de Dieu pour l’humanité.

    Joseph CHESSERON