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  • La graine de moutarde et le levain dans la pâte (Matthieu 13, 31-33 ; Luc 13, 18-21 ; Marc 4, 30-32)

    Le Royaume de Dieu dans les paraboles de l’Evangile

    La graine de moutarde et le levain dans la pâte (Matthieu 13, 31-33 ; Luc 13, 18-21 ; Marc 4, 30-32)

    Lorsque Jésus parle en parabole au sujeu du Royaume de Dieu, il utilise un langage accessible et compréhensif, propre à toucher son auditoire.
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    Dans l’Evangile de Marc, Jésus porsuit son enseignement en langage imagé (verset 30). C’est la dernière des 5 paraboles sur le Règne de Dieu. Comme les précédentes, elle est tirée de la vie rurale. Elle exprime un contraste saisissant. La petite graine de moutarde devient une plante imposante. Y-a-t’il une commune mesure entre cette minuscule graine et l’ampleur de la plante qu’elle produit ? Les maximes populaires jouent volontiers sur cette idée : du plus petit sort le plus grand. De façon similaire le Royaume connaît en Jésus d’humbles débuts, mais il verra un développement gigantesque. Il est promis à une réussite exceptionnelle. Le Règne de Dieu agit avec une force irrésistible à travers les actes et l’enseignement de Jésus. Il est comparable à l’ampleur inattendue du moutardier. Dans l’Evangile de Marc, la graine de moutarde devient plus grande que toutes les plantes potagères, avec de grandes branches. St Matthieu ajoute qu’elle devient un arbre (Matthieu 13, 32). Dans l’Evangile de St Luc, il n’est pas précisé qu’elle est la plus grande des plantes potagères ; elle devient de suite un « arbre » (Luc 13, 19). Cette image est exagérée, exorbitante, pour le moins inattendue, déroutante, comme l’irruption du Règne de Dieu.

    Le moutardier est devenu un arbre dans les branches duquel s’abritent les oiseaux du ciel. Il y a là une allusion au livre de Daniel (Daniel 4, 7-19) qui permet d’évoquer le grand Royaume capable de rassembler tous les peuples, Israël, comme les païens. L’arbre gigantesque abritant la multitude de la gente ailée évoque déjà le Règne de Dieu assuré du succès universel. Le Règne de Dieu s’étendra à toutes les nations, pas seulement et exclusivement à Israël.

    Au contraste enseigné par le grain de moutarde s’ajoute dans les Evangiles de Matthieu et de Luc l’enfouissement du levain et la transformation de la pâte. Cette parabole joue à nouveau sur le rapport « petit/grand ». La pincée de levain mise par la ménagère fait gonfler trois mesures de farine, soit quelque 40 litres, de quoi assurer un repas de 100 personnes. Le levain fait lever la pâte de façon exorbitante. Le contraste entre la petite quantité de levain et la masse qui lève est saisissant.

    Pourtant l’accent s’est déplacé : si le grain de moutarde devient visiblement un arbre, le levain reste enfoui ; un produit particulièrement virulent, employé en quantité imperceptible pour un effet saisissant, tel est le Royaume. Dans la parabole, cette puissance secrète s’identifie au Royaume, et non pas aux chrétiens, ce qui n’est pas tout à fait la même chose. Littéralement le levain est « caché » dans la farine, un terme que Matthieu va reprendre allégoriquement au verset 35 (Matthieu 13, 35).

    Les chrétiens de culture juive auxquels s’adresse Jésus dans l’Evangile de Matthieu connaissent ce thème que l’évangéliste interprète ainsi : ce que le Créateur a préparé et caché, c’est surtout son Royaume dont Jésus est à présent le révélateur.

    La parabole du levain a déjà employé le terme « caché », « enfoui » (Matthieu 13, 33) et le mot reviendra dans l’image du trésor (Matthieu 13, 44). Jésus ne révèle pas seulement le projet divin de toujours, mais la présence même du Royaume, force cachée de croissance, trésor caché à la quête du croyant.

    L’Eglise que connaît Luc, répandue à l’entour de la Méditerranée, abrite déjà un nombre considérable de femmes et d’hommes qui cherchent le Salut. Au cœur des deux paraboles, la graine de moutarde et le levain, se trouve un même processus de croissance, de maturation que Luc illustrera dans les Actes des apôtres : l’expansion étonnante de la prédication évangélique.
    Jésus enseigne que la venue du Règne commence de façon très modeste, sans grand spectacle mais que le processus enclenché se poursuit de façon inéluctable à travers la communauté chrétienne, dans le cœur des croyants, de tous ceux qui cherchent et espèrent encore.

    Père Jean-Marie Loiseau
    jeudi 11 octobre 2018