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  • Aux origines des Evangiles

    Il y a quatre Evangiles. Pour les chrétiens, ils font partie de la Bible, tout comme les Actes des Apôtres, les épîtres et l’Apocalypse . Notre culture occidentale, qu’on le veuille on non, est imprégnée de vingt siècles de christianisme. Du simple point de vue humain (a fortiori du point de vu chrétien), il est important que nous connaissions bien ces racines. Mais peut-on connaître vraiment la personne de Jésus ? La foi des premiers chrétiens n’a-t-elle pas déformé son image ? les Evangiles sont-ils objectifs ?

    Pour répondre à ces questions, essayons de mieux connaître l’histoire des Evangiles, de leur naissance aux textes qui sont aujourd’hui dans nos Bibles. (Comme il a été dit dans la présentation de ce travail, les articles à venir prendront les titres des chapitres du livre de M.Quesnel : l’histoire des Evangiles)

    I. A la source

    A quel moment devons-nous faire commencer cette histoire : A la naissance de Jésus ?au début de sa prédication ? à la résurrection comme acte de naissance du christianisme ?

    Avec M.Quesnel, choisissons la 2ème solution. En effet, les récits de l’enfance ne se comprennent qu’à travers la foi au Ressuscité. et la résurrection s’inscrit dans l’histoire de Jésus parcourant les routes de Galilée et de Judée en annonçant la venue du Royaume. La source des Evangiles se situe bien dans le développement de ce qu’on appelle la vie publique de Jésus.

    Le commencement – liens avec Jean le Baptiste

    Le mot commencement est employé à ce moment-là de l’histoire dans trois de quatre Evangiles et par les Actes (Mc 1, 1 – Lc 3, 23 – Jn 2, 11 Ac 10, 27) et les quatre évangélistes ont en commun de commencer par parler de la prédication de Jean Baptiste. Puis ils parlent de venue de Jésus près de lui, de sa propre prédication et de ses premiers miracles.

    Jean le Baptiste est le représentant le plus célèbre du courant baptiste, qui est plutôt marginal par rapport à la religion officielle et les courants plus structurés que sont les Pharisiens, les Sadducéens et les Esséniens.

    Ce que nous savons de lui vient principalement du Nouveau Testament : dans la foi de l’Eglise, il devient le Précurseur. Résumons en quelques mots le message de Jean. Il vit dans l’attente du Jugement dernier. Il est convaincu que les autorités juives de l’époque ne remplissent pas leur mission et les dénonce vigoureusement (« engeance de vipères… » - Mt 3, 7) ; Il appelle à la conversion et invite à un rite dérivé des ablutions juives, l’immersion dans l’eau vive appelée « baptême de conversion en vue du pardon des péchés » (Mc 1,4). Ce rite a sans doute pris la place des sacrifices offerts au Temple.

    Jésus, au début, a fréquenté le groupe des disciples de Jean. Les premiers hommes qui l’ont suivi ont fait partie de ce groupe(Jn 1, 35-40), mais, très vite Jésus prend ses distances et il y a même une sorte de rivalité. Le groupe des disciples de Jésus cesse de pratiquer des baptêmes.

    Gestes vus et paroles entendues Jésus et les groupes religieux de son temps

    Assez vite, Jésus et ses disciples prennent leur autonomie par rapport au groupe du Baptiste, tant par son enseignement que son mode de vie. Si le désert est pour lui lieu de prière et de ressourcement, il partage le vie de tout le monde (notons la place importante des repas de Jésus dans l’Evangile). il prend ses exemples dans la vie de tous les jours. Il fréquente la synagogue : c’est là surtout qu’il parle. Il va au Temple ; il y prêche et voudrait lui rendre sa pureté originelle (voir l’épisode où il chasse les marchands du Temple).

    Tout en étant proche de l’interprétation de la Loi Juive propre aux Pharisiens, il s’oppose à eux à cause de leur orgueil, leur hypocrisie et leur mépris des petites gens. Il est cependant en relations amicales avec certains d’entre eux (Nicodème ou Joseph d’Arimathie).

    Jésus s’oppose plus vigoureusement à la caste des prêtres, les Sadducéens, en particulier à propos de la résurrection. Ce seront eux surtout qui le feront mettre à mort

    Son enseignement et son comportement

    La prédication de Jésus est centrée principalement sur le Royaume qui est là, mais qui est insaisissable et échappe à toute définition. Jésus invite à aller de l’avant : ce Royaume est « Bonne Nouvelle » (c’est le sens même du mot Evangile). Jésus donne des signes du Royaume : ce sont les miracles, avant-goût du bonheur qu’il proclame.

    Quitte à scandaliser ses compatriotes, il accueille sans distinction tous ceux qui viennent : collecteurs d’impôt, pécheurs, étrangers, femmes de mauvaise vie, mais aussi gens de la « bonne société », tous ces gens de bonne volonté qui trouvaient en lui des raisons d’espérer.

    Tout cela n’est pas présenté dans un ordre chronologique comme l’aurait fait un historien contemporain : Chaque auteur regroupe les paroles et les gestes de Jésus suivant des thèmes différents : Impossible d’écrire une « vie de Jésus » au sens moderne du terme ; impossible, à partir des Evangiles, de décrire l’itinéraire de la vie publique de Jésus ; impossible de faire son portrait physique.

    Les derniers jours

    Par contre, les quatre Evangélistes suivent, à quelques détails près, le même plan pour les récits de la Passion. Sans doute les disciples se sont-ils remémorés les derniers événements de la vie terrestre de Jésus, pour ainsi dire heure par heure, comme un drame qu’ils ont suivi et dans lequel ils étaient impliqués, ne serait-ce que par la lâcheté de leur réaction. Ils ont dû en faire le récit très souvent, en de multiples occasions, comme le laisse entendre le premier discours de Pierre à la Pentecôte.

    Les récits de la Passion, malgré leurs variantes (l’intervention de la femme de Pilate en Matthieu, et le dialogue plus développé entre Jésus et Pilate), dans leur structure même, n’ont pas changé : ils viennent sans doute de récits primitifs.

    On ne s’est pas souvenu de la période dite de vie publique de la même manière. On a retenu les paroles et les gestes les plus significatifs et on les a rassemblés sans le souci premier de la chronologie. L’image de gens prenant des notes pendant que Jésus parlait, ou le soir, est invraisemblable : les conditions d’écriture ne le permettaient pas. Cela ne concorde pas avec ce que sont les récits évangéliques, qui sont des témoignages présentés selon un plan propre à chacun des Evangiles.

    En conclusion, disons que la Source des Evangiles se situe dans cette période de la vie de Jésus allant de ses débuts avec Jean Baptiste jusqu’à sa mise au tombeau. Naturellement, les récits suivant la Résurrection font partie de l’Evangile. Ils en sont même le sommet : la première communauté dit sa foi au Ressuscité. Comment vont être élaborés ces récits évangéliques ? Ce sera l’objet du prochain article.

    Joseph CHESSERON