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  • Thomas, l’incrédule. Il n’est pas indifférent. Il voudrait croire mais…mais il ne se fie pas à la parole des autres. Il cherche à faire sa propre expérience. Il cherche des preuves, des signes tangibles sur lesquels faire reposer sa foi. : Voir la trace des clous, mettre sa main dans le côté percé du Christ…

    Comme ils sont nombreux les Thomas d’aujourd’hui ! Comme ils sont nombreux ceux qui n’arrivent pas à faire le pas. Beaucoup sont très proche de nous, dans nos familles, nos amis. Ils sont sur le seuil, attentifs. Ils regardent l’Eglise et s’interrogent. Beaucoup ont le sentiment que l’Eglise n’est pas vraiment fidèle au message évangélique et demandent une réforme profonde de l’institution.

    Or voici qu’un nouveau pape vient d’être élu : le pape François. Restons un peu sur cette question du témoignage de l’Eglise.

    Lors des congrégations générales précédant le conclave chaque cardinal devait prendre la parole pendant une ou deux minutes devant tous les autres. Le cardinal Bergoglio a fait une intervention très remarquée qui, dit-on, aurait été déterminante pour son élection. Il a parlé de l’Eglise et disait ceci, je cite :

    - « Evangéliser suppose dans l’Eglise l’audace de sortir d’elle-même. L’Eglise est appelée à sortir d’elle-même et à aller jusque dans les périphéries, pas seulement géographiques mais aussi existentielles : où résident le mystère du péché, la douleur, l’injustice, l’ignorance, le mépris du religieux et de la pensée, et de toute misère. Quand l’Eglise ne sort pas d’elle-même pour évangéliser, elle devient son propre référentiel et, donc, tombe malade, …d’une sorte de narcissisme théologique ».

    - « Elle néglige de viser le ‘mysterium lunae’ et donne lieu à ce mal si grave qu’est la mondanité spirituelle, qui est le pire mal qui peut survenir dans l’Eglise ».

    - Il disait enfin : « En simplifiant, il y a deux images de l’Eglise : l’Eglise évangélisatrice qui sort d’elle-même,… ou l’Eglise mondaine qui vit en elle, d’elle-même et pour elle-même. Cette analyse devrait éclairer les changements possibles et les réformes qui doivent être faites pour le salut des âmes »

    - Il concluait son propos en disant que « le prochain pape doit être un homme qui aide l’Eglise à sortir d’elle-même pour aller jusqu’aux périphéries existentielles de l’humanité, qui l’aide à être la mère féconde de la "douce et réconfortante joie d’évangéliser » . Fin de citation.

    N’est-ce pas ce qu’il faisait lorsqu’il était cardinal, en allant si souvent dans les bidonvilles de Buenos-Aires ? Et, depuis son élection, n’est-ce pas ce qu’il continue à faire par des gestes forts, comme le fameux lavement des pieds dans la prison des mineurs le jeudi saint, geste suivi de l’homélie dans laquelle il invitait les prêtres à aller dans les périphéries de l’existence ? Homélie, - chose totalement inhabituelle – chaleureusement applaudie par les prêtres présents à cette messe.

    Ce document publié ces jours-ci apparaît clairement comme le programme de notre nouveau pape.

    Il est certain que ce pape, que l’on appelle déjà le pape des pauvres, peut réconcilier beaucoup de Thomas d’aujourd’hui avec l’Eglise et l’Évangile.
    Pourquoi  ? Parce qu’il apparaît comme un homme cohérent. Ses gestes correspondent à ses paroles et à sa foi. Ils touchent les cœurs. Nous le savons bien, ce n’est pas tant de maîtres, d’enseignants, de professeurs que les Thomas d’aujourd’hui attendent, mais de témoins vivant réellement et humblement de l’Évangile. Ainsi donc, Thomas l’incrédule a certainement besoin de rencontrer François.

    Quelles conséquences pour nous aujourd’hui ?

    Nous pouvons nous interroger au moins sur deux registres : le registre de notre Eglise diocésaine et niortaise dans le contexte de la réforme des paroisses d’une part, et d’autre part le registre plus personnel de chacun de nous.

    Le registre de notre Eglise diocésaine et niortaise : Nous sommes en pleine réforme des paroisses. Parfois, on la justifie surtout par rapport à la pénurie future de prêtres. Il est vrai que le nombre de prêtres va diminuer drastiquement dans les 20 ans qui viennent. Et on passe beaucoup de temps à s’interroger sur les délimitations géographiques des futures paroisses. Mais la question beaucoup plus fondamentale à nous poser avant toute chose est celle de la Mission. Car l’Eglise, - et donc les paroisses - n’existe que pour la Mission. Où sont les Thomas d’aujourd’hui ? Où sont les périphéries, les lieux de souffrance et de fracture dont parlait le cardinal Bergoglio auxquels il nous faut être particulièrement attentifs et sensibles dans nos projets de réforme paroissiale ? Comment rejoindrons-nous davantage l’humain, l’humain qui souffre et qui peine ? Comment, en fonction des moyens dont nous disposons, nous ferons-nous proches de ceux qui sont loin ou sur le seuil et qui attendent ? Quelle cohérence les futures paroisses vont-elles donner à voir avec le message évangélique ? Pauvreté, simplicité, compagnonnage, fraternité, service, sont sans doute des mots-clés, plus encore, des appels, pour nos projets de futures paroisses.

    Ces questions sont vastes, délicates et profondes. C’est ensemble, au titre de notre baptême, qu’il nous faut y réfléchir et tenter d’y apporter des réponses

    Et sur le registre plus personnel, n’est-ce pas aussi, à la cohérence que nous sommes appelés, si nous voulons témoigner en vérité de l’Évangile ? Oui, si nous nous voulons disciples de Celui qui s’est fait proche, en particulier des pauvres, des exclus, et des blessés de la vie, de Celui dont la parole était toujours bienveillante, alors agissons comme lui : Comme lui, nous faire proche, comme lui devenir serviteurs de nos frères. N’est-ce pas ce que nous chantons souvent : « Comme lui, savoir dresser la table, Comme lui, nouer le tablier, Se lever chaque Jour, Et servir par amour, Comme lui,… »

    Alors, les Thomas d’aujourd’hui, ceux qui sont sur le seuil, en voyant la façon dont l’Eglise dans ses nouvelles paroisses, et nous, dans nos communautés locales ou personnellement, nous nous faisons serviteurs de nos frères, pourront ils peut-être discerner quelque chose de la saveur de l’Évangile.

    Thomas l’incrédule, a certainement besoin de rencontrer François. François, l’homme de la simplicité, de la fraternité et de la tendresse.

    Soyons tous des François d’aujourd’hui.

    B. de Mascarel