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    Le Chanoine Chollet :
    homme de paix

    Un jeune prêtre raconte deux histoires : "C’était je pense, le 25 janvier 1944. Je me trouvais au collège de la Providence lorsque je reçus un billet du curé de saint Porchaire « Demain, soyez de bonne heure pour assurer, comme vous pourrez, les messes de la matinée ». Ce matin 26, pas de Monsieur le curé à l’église. Le sacristain me dit : « Il ne viendra que ce soir. » J’assurai 4 messes.

    Plus tard, je sus ce qu’il avait fait. Averti par Mlle Marzellier qui travaillait à la préfecture, il avait été informé que lundi matin tous les juifs de Poitiers allaient être arrêtés. Il y en avait beaucoup parmi ses amis. La plupart des magasins de la rue Gambetta étaient tenus par des juifs. Le patron du Grand Magasin, M. Matthias, était son ami : celui-ci, d’ailleurs chaque année offrait un costume de communion solennelle à un enfant pauvre de la paroisse. Je pense que ce dimanche-là, il visita plus de 50 familles, insistant pour qu’elles partent, les assurant que des « passeurs » les attendaient à Montamisé et à Jardres. Il en a peu parlé sinon pour dire son désappointement. Une famille sur trois accepta de partir. Les autres qui se sentaient si bien insérées à Poitiers n’y croyaient pas".

    Curé de saint Porchaire de 1937 à 1959, cet homme doué pour les contacts et le porte-à-porte va trouver sa place pendant et après la guerre. Né en 1878, il a participé à la grande guerre : victoire de la Marne et bataille de Verdun. Dans la paroisse qu’il découvrit il n’y avait ni école à soutenir, ni œuvre particulière sa pastorale n’était pas compliquée : c’était celle du porte-à-porte, du tête-à-tête et du coeur-à-coeur. C’était celle du service rendu. Quand il s’agissait d’aider ses paroissiens dans leurs difficultés mêmes professionnelles et familiales, aucune démarche ne le rebutait, aucun obstacle ne l’arrêtait. Semaine religieuse, 1959

    Arrêté en 1942, il passe 5 semaines à la Pierre Levée ; de retour, il dresse une échelle sur le mur d’enceinte du presbytère pour passer dans une maison amie en cas d’alerte.

    Autre anecdote : les jésuites habitaient rue Grimaud, et régulièrement, ils venaient déjeuner au presbytère. Parmi eux, le Père Aubry, taciturne qui ne sortait jamais et on voyait sa sœur se promener à vélo le dimanche. Le chanoine avait dit à son vicaire : « Ne parlez pas politique. On ne sait jamais même avec d’autres prêtres. » Après la libération, on apprit que la sœur du P. Aubry n’existait pas. Le P. Aubry, membre de l’armée secrète, se déguisait pour transmettre des messages.

    Vint la Libération, il accepta d’être membre de comité de libération de Poitiers. Il n’était pas le seul prêtre dans ce cas (citons le doyen maître de St Savin et l’abbé Jean Chesseron à Chatellerault, l’abbé Dubois d’Archigny arrêté, l’abbé Denécheau de l’Absie (79) membre des états généraux des comités de libération). A l’occasion, il dénonce énergiquement les injustices, l’épuration et ses méthodes. En effet, les cours de justice travaillent sous la pression, en 1945, des commissions d’épuration. Il dénonça aussi « les égoïstes, qui ont peur d’accueillir et gardent des chambres inoccupées. » Un de ses articles dans le Libre Poitou rappelle l’urgence du logement. « Voici deux mois que nous goûtons la douceur de la libération et que nous pouvons respirer librement. Nous sommes mal fondés à nous plaindre, nous qui habitons une région relativement épargnée comparativement à tant d’autres qui ont été dévastées après la guerre... Il serait inadmissible que des chambres restent inoccupées. » En juin 1945, il démissionne avec MM Savatier, Gallet et de la Fouchardière pour s’opposer à la proposition d’une loi pour une école unique.

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