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  • 5ème dimanche de Pâques L’importance de la Parole

    Je vous propose de commencer notre méditation avec cette phrase des apôtres rapportée par la 1ère lecture : « il n’est pas normal que nous délaissions la Parole de Dieu », et plus loin, ils ajoutent : « nous resterons assidus à la prière et au service de la Parole. »

    La Parole est première. C’est l’expérience même de la vie. Dès la naissance d’un enfant, on lui parle, même s’il ne comprend pas.

    La Bible exprime la foi en un Dieu qui parle, un Dieu qui parle pour appeler, pour donner sa loi et son alliance, pour exprimer son amour.

    Je crois qu’il est bon de reprendre conscience que notre liturgie elle-même nous fait revivre cette priorité : tout d’abord, l’écoute de la Parole, puis ensuite le partage du pain. Pas d’eucharistie sans écoute de la parole, pas de signe d’alliance, pas de geste sacramentel sans l’enraciner dans la parole qui atteste de l’amour de Dieu.

    Ce temps de confinement peut être compris comme cette chance qui nous est donnée de redonner priorité à la Parole.

    Il est intéressant de voir que dans la 2ème phrase, les apôtres mettent en relation la prière avec le service de la Parole. La source qui fait que la Parole peut être donnée comme parole vivante, comme source de vie, c’est la prière, l’expérience qui considère la parole, non seulement comme connaissance des textes bibliques, mais comme relation, alliance, communication, dialogue, échange.

    Ces deux fonctions dont le livre des actes des apôtres situe l’origine dans l’expérience des apôtres demeurent pour la vie chrétienne les tâches premières et fondatrices. En ce sens, les services et ministères sont tous ordonnés à ces deux piliers apostoliques.

    C’est là que se structure la foi.

    On retrouve cette importance de la Parole dans la 2ème lecture : « la pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle, une pierre d’achoppement, un rocher sur lequel on trébuche. Ils achoppent, ceux qui refusent d ‘obéir à la Parole ».

    Beaucoup de spirituels insisteront pour dire que la 1ère des vertus est l’écoute ou l’obéissance, la démarche qui donne place à la Parole de l’autre. Certains, notamment des pères du désert, diront que cette obéissance-là est expérience de liberté en ce sens qu’elle nous libère de nos propres pensées et opinions. Croire que la parole de l’autre peut être pour moi libératrice, parole neuve qui me fait sortir de fausses idées, qui m’engage sur un chemin d’exode, un chemin pascal, c’est simplement croire qu’en ce monde il est possible d’avoir un à priori favorable sur l’autre qui vient. Les spirituels anciens y voyaient le premier pas sur le chemin du véritable amour, de l’amour exigeant de l’évangile.

    La figure du Christ rejetée est selon St Pierre figure du refus d’écouter, figure du rejet de Dieu lui-même.

    L’évangile nous rappelle que cette parole, c’est le Verbe, le Christ au milieu de nous : « je suis le chemin, la Vérité et la Vie ».

    Cette magnifique parole est donnée à Thomas. Les premiers chrétiens ont parfois fait de lui la figure du néophyte. Vous devinez pourquoi ! Le 2ème dimanche de Pâques, nous avons lu le texte qui raconte son absence à la 1ère rencontre. Il est très vite devenu le jumeau de celles et ceux qui arrivent après coup, qui souhaitent devenir chrétiens et doivent faire confiance à la Parole des frères déjà présents.

    « Je suis le chemin », dit Jésus. C’est dire que la parole du Christ rend un parcours et une histoire possibles ; qu’il est possible d’en faire le récit, qu’avec nous qui entrons dans la foi, l’histoire sainte s’actualise et continue. Il y a toujours un chemin, car c’est le Seigneur lui-même.

    Nous le chantons aussi parfois : « ils deviennent chemin... »

    « Je suis la vérité ». La Parole qui est offerte est révélation, elle ouvre à l’intelligence de l’Écriture, mais aussi sur soi-même et sur les relations vécues. On devine aussi comme une progression : d’abord découvrir Jésus comme chemin et avec lui se mettre en route et risquer les premiers pas, puis risquer l’aventure de la Vérité, oser faire la vérité sur Dieu lui-même et comme dans notre prière oser l’appeler Père.

    Comment ? En s’approchant de celui qui a dit « je suis la vérité », et en devenant soi-même plus vrai.

    « Je suis la vie ». L’évangile en effet prolonge son texte en parlant des œuvres avec cette affirmation étonnante : « celui qui croit en moi accomplira les mêmes œuvres que moi. Il en accomplira même de plus grandes… »

    En prenant le chemin et en le devenant, en devenant plus vrai, il s’agit aussi de devenir Vie, de devenir Vivant, de participer à la vie du ressuscité.

    Puissions nous vraiment entrer dans cette foi et nous mettre au service de la Parole de vie !

    P. Bernard Châtaignier